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Les 30 et 31 mai derniers, se tenait le Conseil Compétitivité de l’Union européenne et se voyait abordée la question de la brevetabilité des logiciels.
A cette occasion, le président de l’April, une organisation dont le but est de promouvoir et défendre le logiciel libre, déclarait qu’il s’agissait là d’une « occasion unique d’agir sur les brevets logiciels et sur une insécurité juridique qui menace le logiciel libre et de nombreuses entreprises, notamment des PME et PMI, en les empêchant d’innover », en ajoutant qu’ « une remise à plat du système des brevets en Europe est essentielle pour éviter une situation semblable à celle des États-Unis où des millions de dollars sont perdus par un droit des brevets hors de contrôle et pour assurer le contrôle démocratique du système des brevets. »
http://www.april.org/la-fin-du-brevet-logiciel-cest-maintenant
En effet, la brevetabilité des logiciel est loin de faire l’unanimité et nombreux sont ses détracteurs.
En cause notamment, le fait que de tels brevets, au lieu de protéger l’innovation, constituent en réalité des « armes de guerre économique pour de grands groupes monopolistiques qui les utilisent pour exclure du marché leurs concurrents, dont les entreprises de logiciel libre », les empêchant ainsi d’innover et de proposer leurs produits.
https://www.april.org/synthese-les-brevets-logiciels
Fleur Pellerin, la ministre déléguée française chargée des PME, de l’Innovation et de l’économie numérique déclarait d’ailleurs à cet égard que « la brevetabilité du logiciel induirait un cloisonnement de l’innovation qui serait néfaste à l’écosystème numérique vu dans son ensemble » et s’affichait clairement comme étant opposée à le brevetabilité du logiciel.
http://www.pcinpact.com/news/71241-brevet-unitaire-europee-conseil-competitivite.htm
La brevetabilité des logiciels poserait donc un problème en termes de concurrence. En effet, elle aurait pour conséquence de rendre le marché du logiciel nettement moins compétitif par la création de monopoles. Avec cette diminution de la concurrence, on assisterait à une augmentation des prix et l’innovation serait étouffée.
La question que pose la brevetabilité des logiciels du point de vue de l’innovation est la suivante : on sait que l’innovation est cumulative, c’est-à-dire qu’elle repose sur ce qui lui précède. Or, si l’innovation antérieure se voit protégée par un brevet, cela signifie que le détenteur de ce brevet dispose d’un droit exclusif sur son invention, et peut donc interdire à toute personne de l’utilisée, avec pour conséquence que la nouvelle invention ne pourrait pas être diffusée librement. Donc celui qui souhaiterait utiliser le logiciel breveté devrait demander l’autorisation à celui qui détient le brevet, ce qui aurait pour résultat que le détenteur du brevet imposerait à sa guise ses conditions à l’utilisation de son logiciel.
En conséquence, « l’auteur du nouveau logiciel est donc dépossédé des droits d’auteur sur son œuvre, et ses droits sont alors complétement subordonnés à ceux des détenteurs des brevets antérieurs ; étant donnée la nature incrémentale du logiciel, l’ensemble de la production logicielle serait alors soumise au bon vouloir de quelques détenteurs de brevets. »
https://www.april.org/synthese-les-brevets-logiciels#htoc7
Il est donc aisé de comprendre la raison de objections à la brevetabilité des logiciels s’agissant de la concurrence : ceux-ci sont utilisés comme armes afin de restreindre voire d’empêcher l’entrée de compétiteurs innovants sur le marché.
http://www.forbes.com/asap/2002/0624/044.html
De plus, il est important de préciser que la durée de vie des brevets ne saurait s’accorder avec celle des logiciels. En effet, « le logiciel sera obsolète au bout de quelques années, mais le brevet continuera à restreindre les innovations basées sur la technique brevetée pendant vingt ans. »
https://www.april.org/synthese-les-brevets-logiciels#htoc7
En guise de conclusion, on peut donc dire que la brevetabilité du logiciel constitue bel et bien un danger en termes de concurrence : le brevet est utilisé a de mauvaise fins dans le but de permettre à quelques uns uniquement de faire des profits et n’atteint pas son but de promouvoir l’innovation.
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Après les très nombreux et intéressants commentaires juridiques sur le sujet, je souhaiterais prendre les choses sous un autre angle. Un angle différent de l’étudiant en droit qui regarde le sujet au travers du seul prisme juridique.
Etant moi-même programmeur amateur, quand on me parle de breveter des logiciels j’ai l’impression de tenir une discussion sortie d’une œuvre de Ionesco. Je m’explique.
Au niveau des fondements, des sources les plus profondes, programmer c’est d’une certaine façon parler à une machine dans un langage qu’elle comprend. On lui dit de réaliser telle opération quand on lui donne telle information et de moduler sa réaction opérative si l’information qui lui est donnée comporte telles ou telles caractéristiques. Ainsi, tout comme de véritables langues, la programmation a son vocabulaire, sa syntaxe, ses « règles grammaticales ». Toujours dans le même ordre d’idée, tout comme le langage humain, on a développé différentes langues dans le monde : Pascal, Cobol, C, SQL, Oz, Prolog. Ces langages utilisent se caractérisent par un mode comme dans notre propre langage : impératif, déclaratif, etc.
Dès lors, quand on me parle de breveter un logiciel, j’ai l’impression qu’on me demande si oui ou non on devrait breveter Le Père Godot de Balzac ou Les Identités Meurtrières de Malouf.
A mon sens, les programmes ne sont que l’expression des idées et de la volonté d’un programmeur ou d’un ensemble de programmeurs. Cela peut être une expression artistique (jeux vidéo), utilitaire (bureautique), haineuse (virus)… Des expressions littéraires humaines ou nécessaires pour mieux mener notre vie personnelle, professionnelle, sociale (par exemple Facebook est d’une certaine façon tellement complexe qu’on devrait le considérer comme un programme on-line).
Dès lors, de la même façon que l’on ne peut concevoir de breveter l’utilisation d’une langue humaine, on ne devrait pas concevoir de breveter un logiciel qui n’est que l’expression d’idées d’un programmeur dans un langage peu conventionnel pour le commun des mortels qu’est un langage de programmation.
De surcroît, comment pouvoir affirmer que tel logiciel est brevetable, si comme le souligne à juste titre monsieur Tancré dans les commentaires infra un logiciel est une construction dont chaque strate est le fruit du travail des autres ? Tout programmeur dans le monde entier a commencé par ce qu’on appelle dans le milieu un « Hello World ». Il s’agit du premier code que tous programmeur a tapé au moins une fois dans sa vie :
#include
void main(void)
{
printf(“Hello world !!\n”);
}
Ce sont là les jalons d’un langage appelé minimalement « C » qui sont exposés dans ces quelques lignes. De là, va découler tout le développement du langage et l’apprentissage du programmeur pour réaliser des choses aussi variées qu’un traitement de texte ou un logiciel de calcul de trajectoires balistiques, tout comme notre professeur de primaire nous a appris l’alphabet, la conjugaison, la grammaire et quelques mots de vocabulaire.
A partir de là, on reprend régulièrement des scripts ou des morceaux de code qu’on a trouvé intéressants dans un logiciel ou dans un autre, un peu comme des citations. On emprunte des figures de styles, on emprunte des mots, des idées… Tout comme le font les auteurs, que ce soient des auteurs de romans ou de discours politiques ; tout comme nous le faisons en tant qu’êtres humains dans la vie… car tout ce que nous faisons comme êtres humains dans notre vie de tous les jours n’est que la répétition de choses que nous avons apprises, vues, entendues, senties… Ainsi, peut-on parler d’invention quand on sait que Microsoft Word 2010 a pris énormément de Word 2007 qui lui-même prend des versions antérieures de Word, qui elles-mêmes ont pris la logique du logiciel Wordperfect de la compagnie Corel, qui elle-même prend ses sources dans la machine de traitement de texte Wang de 1977 ??? Je ne le pense pas. Il y a de l’innovation dans les idées, mais fondamentalement cela ne reste que l’expression « d’un auteur » qui parle un drôle de langage…
Dès lors comment l’article 2 et suivant de la loi sur les brevets du 28 mars 1984 pourrait trouver un écho dans ces œuvres que sont les logiciels ? A vrai dire la seule vraie invention dans le monde logiciel, c’est l’invention de la programmation elle-même ! Or, qui peut se dire propriétaire de la programmation ? De la même façon, qui pourrait se dire propriétaire de la langue française ? La langue n’est finalement qu’un objet vivant, qui se maintient et se développe au travers de chaque personne qui l’utilise… ce constat vaut également pour la programmation selon mon opinion… S’il fallait octroyer un brevet, il faudrait l’octroyer à l’ensemble des programmeurs qui par l’exercice de leur art ont maintenu et développé les langages de programmation et alors, de ce fait même, ce brevet n’aurait plus aucun intérêt.
Ceci est un commentaire qui tient plus de la philosophie juridique que du droit intellectuel, mais que serait le droit sans réflexions sur l’essence de ce qu’on essaye de protéger ? 😉
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Comme il l’a été amplement souligné dans l’article et les précédents commentaires, l’intérêt du brevet est d’encourager l’innovation en assurant à son détenteur un monopole sur le commerce de son invention, ce qui en fait un incitant économique certain. Il a été vu également en quoi cela posait problème quant aux logiciels, qui ne remplissent a priori pas les conditions de brevetabilité, qui ont néanmoins fait l’objet de délivrances de brevet par l’OEB et les offices nationaux, et qui, de fait, opposent les différents acteurs autour de leur exploitation quant à la question même de leur brevetabilité.
Fabian Baucq a bien soulevé, dans son article, les différents avantages et désavantages de la brevetabilité des logiciels, et l’on peut aisément comprendre pourquoi certains acteurs du monde économique y sont favorables, tandis que d’autres y sont totalement opposés.
S’il y a en tout cas une chose qui m’apparait clairement quant à la question posée par cet article, c’est que le brevet n’est de toute façon pas l’outil approprié s’agissant de la protection des logiciels, du moins la protection du logiciel pour lui-même, lorsqu’il n’est pas lié à la mise en œuvre d’une invention par un programme d’ordinateur, car je vois mal, d’une part, l’intérêt d’investir des sommes importantes dans la protection par brevet d’un logiciel qui, par nature, appartient à un domaine – l’informatique – en constante évolution et donc susceptible de se voir dépasser extrêmement rapidement. On peut donc se poser la question de savoir s’il est réellement pertinent de demander des brevets un peu partout, tout en sachant que la procédure peut être assez longue étant donné la multiplication des demandes auprès de l’OEB et des différents offices nationaux, pour au final, une fois le brevet obtenu, se retrouver en concurrence avec un programme plus récent et plus efficace.
D’autre part, comme on l’a rappelé ici plusieurs fois, lorsque le code source est compilé, il devient pratiquement impossible de le reconstituer, à moins de repasser par toute la phase inventive, et donc, de créer un nouveau logiciel [1]. Ceci me parait constituer une protection suffisante au regard de ceux qui entendent créer des programmes à des fins commerciales. Quant à ceux qui ne le font pas dans un but de lucre, mais dans leur intérêt personnel ou dans celui de la société avec une idée de partage des connaissances comme cela est le cas des partisans de l’open source, le droit d’auteur me parait être une protection tout à fait appropriée, et qui présente en plus l’intérêt d’être automatique.
En résumé, si toute la problématique de la brevetabilité des logiciels me parait extrêmement intéressante d’un point de vue purement réflexif, il me semble qu’en l’état des choses, la question est déjà réglée. Malgré ses avantages, le brevet ne me parait pas adapté à la protection des logiciels, leur obtention par certains acteurs du secteur économique n’est donc non seulement pas nécessaire, mais contribue de plus à concentrer l’exploitation du secteur entre les mains de quelques grandes firmes uniquement, et par là-même à freiner l’innovation (ce point a déjà plus précisément été explicité par Maxime Tancré).
En conclusion, pour les raison expliquées ci-dessus, il m’apparait que le droit d’auteur associé au secret des codes source protège de manière suffisante les programmes d’ordinateur, qu’il faudrait donc que l’OEB se prononce contre l’attribution de brevets dans ce domaine spécifique, et que l’institution d’une protection sui generis ne serait, par conséquent, pas nécessaire.
[1] VOLLE, M., « Faut-il breveter les logiciels », 2005.
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La propriété intellectuelle est un pilier fondamental du monde industriel ainsi que de l’innovation technologique. De nos jours, une nouvelle forme d’industrie gagne du terrain sur le marché, plus précisément l’industrie informatique. Le monde informatique, caractérisé par l’exploitation de nombreux logiciels, comporte également de grandes inventions ainsi qu’un désir perpétuel d’innover. Par conséquent, dans la logique de la tradition industrielle il est donc naturel de breveter les logiciels pour gratifier le travail de l’inventeur, obtenir un contrôle juridique et commercial sur l’invention et en tirer un profit optimal. Ceci semble être le raisonnement classique que tout éditeur de logiciel sera tenté d’appliquer, toutefois, une grande controverse existe au sujet de la brevetabilité des logiciels.
Les Etats-Unis de même que le Japon, ont suivi ce raisonnement et brevettent leurs logiciels depuis plus de 10 ans. Néanmoins, au bout de quelques années, il s’est avéré que ce brevetage a engendré des effets contraires aux effets recherchés dans le système de brevets, citons ; la réduction de la diffusion des connaissances, ainsi que la diminution de l’innovation et par conséquent de la concurrence. Analysons de plus près, les effets de breveter ou de ne pas breveter un logiciel.
L’algorithme ainsi que le code source sont les éléments clefs dans le domaine de la brevetabilité des logiciels. Le code source, comme l’indique Mr. Brahy dans son article, est déjà automatiquement protégé par le droit d’auteur, mais ceci ne freine pas la possibilité d’une protection plus accrue par un brevet. Un éditeur qui choisit donc de ne pas breveter son logiciel dispose dès lors de deux choix, soit il garde son code source secret, soit il le rend public.
L’éditeur d’un logiciel qui ne brevette pas ce dernier et qui opte pour le secret de son code source, est généralement un petit éditeur ne sachant pas se permettre l’obtention d’un brevet, mais souhaitant malgré tout ne pas divulguer son ‘know-how’ aux concurrents sans acquérir de contrepartie. Car sans ce code source, personne n’est apte à analyser le logiciel sans devoir repasser impérativement par toutes les étapes cognitives que l’éditeur a surmontées.
Ne pas répandre son code source, permet également à l’éditeur du logiciel d’échapper à des contrefaçons potentielles dans le domaine du droit d’auteur ainsi que de voiler d’éventuelles reproductions qu’il aurait commis dans la création de son logiciel. Ceci protège efficacement les éditeurs, mais n’est pas favorable pour les consommateurs.
Dans l’intérêt des consommateurs, il faut un éditeur qui ne brevette pas son logiciel et qui choisit en plus de révéler son code source. Ceci permet dès lors à ces consommateurs, s’il leur semble nécessaire, de corriger ou de faire corriger par un tiers les défauts avérés du logiciel. Pour les petits éditeurs ceci leur procure également la possibilité d’offrir à leurs utilisateurs une plus grande sécurité ainsi que de leur garantir une certaine continuité du système logiciel. Le dévoilement du code source prône également l’émergence de standards, qui sont nécessaires comme base sur lequel appuyer son innovation. Allant encore plus loin, sont les logiciels libres, qui poussent vivement leurs clients à participer à l’amélioration du logiciel à travers un processus collectif.
On peut ainsi déduire que, dans un contexte sans brevet logiciel, l’éditeur choisit soit de favoriser son savoir-faire au- delà de son envie de contenter les consommateurs, et par conséquent de ne pas dévoiler son code source, soit il préfère plaire à ses consommateurs et contribuer au développement de standards et communique de ce fait son code source.
De l’autre côté de l’image, on a les logiciels qui sont munis d’un brevet. Les éditeurs bénéficiant d’un logiciel breveté peuvent donc publier leurs codes sources sans devoir craindre une imitation de leurs connaissances techniques ou informatiques, incorporées dans leurs logiciels, puisque celles-ci sont entièrement protégées par le brevet y rattaché.
Néanmoins, si on creuse plus profondément dans le raisonnement, on constate toutefois que l’application de brevet au logiciel, renforce la volonté de garder secret sa connaissance, car un éditeur qui rend public son code source, ouvre les portes à d’éventuelles contrefaçons. Un éditeur A, qui révèle son code source sera désavantagé par rapport à un éditeur B, qui ne publie pas son code source, lorsque ce deuxième l’attaque en contrefaçon concernant certains principes de fonctionnement de son logiciel, car le premier n’aura pas les moyens d’obtenir légalement le code source de B puisqu’il le garde secret.
C’est un cercle vicieux qui n’incite donc pas vraiment les éditeurs à breveter leurs logiciels et surtout pas les petits éditeurs qui n’ont pas les moyens financiers de libérer de grandes sommes pour les consacrer à des procédures judiciaires, contrairement aux grands éditeurs qui détiennent d’amples brevets et surtout d’excellentes équipes de juristes spécialisés, ce qui augmente d’autant plus leurs chances de contrer la plupart des contentieux en contrefaçon de brevets.
Les grandes entreprises se contentent dès lors de breveter les procédés de base nécessaires pour établir un logiciel informatique plus complexe et multiplient ainsi leurs possibilités de poursuivre un concurrent en contrefaçon. Dès lors ne détourne-t-on pas complètement le but initial du brevet, qui est de prôner l’innovation et non de la ralentir par de nombreuses procédures judiciaires ?
Il existe donc indiscutablement une controverse concernant la brevetabilité des logiciels. Selon qu’on est un petit éditeur, un développeur indépendant ou un grand éditeur, ou selon qu’on est consommateur on non, notre opinion sur la brevetabilité diffère fortement. Comme l’affirme Mr. Brahy dans son article, il revient dorénavant à l’Office européen des brevets de prendre une décision définitive concernant la validité de ces brevets logiciels pour mettre fin à cette insécurité juridique.
Sources:
JUNG, A. ( 2006), La brevetabilité des logiciels, Centre d’Etudes Internationales de la Propriété Industrielle, Strasbourg.
SMETS, J.P. (2000), Stimuler la concurrence et l’innovation dans la société de l’information.
Brevet ou droit sui generis : quelle protection convient-il d’envisager pour les logiciels et les autres inventions immatérielles ?, Foundation for a Free Information Infrastructure. Disponible à : http://ladoc.ffii.fr/brevet.pdf (Consulté le 15/04/2012)
VOLLE, M. (2005). « Faut-il breveter les logiciels ». Disponible à : http://www.volle.com/opinion/brevet.htm (Consulté le 15/04/2012).
Cncpi , « Le brevetabilité des logiciels ». Disponible à : http://www.cncpi.fr/iaa145-45-brevetabilite-logiciels-brevet-logiciel-innovation-licence.htm?level=(Consulté le 15/04/2012).
Petite précision, le texte n’est pas de moi mais de Fabian Baucq
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La question de la brevetabilité des brevets est particulièrement contestée, que ça soit dans le monde politique ou par les différents acteurs informatiques (communauté open-source, petits développeurs, etc.).
En premier lieu, le logiciel fait déjà l’objet d’une protection, à savoir le droit d’auteur. Cette protection ne nécessite aucune formalité et protège toute création originale. La différence avec le brevet est que tout titulaire d’un brevet peut revendiquer des droits sur la création originale d’autrui et en empêcher la distribution. Le brevet doit en outre être une invention qui implique une activité inventive, nouvelle (qui n’existe pas dans l’état de la technique) et doit répondre à une obligation de divulgation. L’innovation peut résider dans plusieurs éléments, entre autres : l’algorithme, le code source, (langage de programmation dans lequel est exprimé l’algorithme), le logiciel lui-même, une fonctionnalité.
Les logiciels et le code source sont déjà protégés par le droit d’auteur. En ce sens, breveter un logiciel est critiquable, parce qu’il bénéficie déjà d’une protection harmonisée par la Convention de Berne. De plus, parce que breveter un logiciel impliquerait de breveter toutes les fonctionnalités qui le composent, la plupart étant triviales. (Voir l’affaire du One-Click Patent d’Amazon [1]). En revanche breveter une fonctionnalité spécifique semblerait déjà plus à même de répondre aux conditions du brevet, c’est-à-dire une solution technique à un problème technique. Dans le même ordre, déposer un brevet sur un algorithme qui résout un problème spécifique semble être intéressant. On ne protège ici plus l’expression mais l’idée. Néanmoins les détracteurs du brevet portant sur un algorithme avancent le fait que celui n’est pas différent d’une formule mathématique, qui n’est pas protégée par la propriété intellectuelle (c’est une loi de la nature).
J’ajouterai que le logiciel bénéficie en plus de la protection technique du secret. Une fois le code source compilé, il est impossible d’y avoir accès et donc la technologie employée est protégée par le secret.
D’autres arguments économiques vont à l’encontre du brevet logiciel. Une étude récente souligne le fait que si le nombre de brevets déposés est en croissance, au final peu de firmes déposent des brevets logiciels. Ceux-ci sont détenus par une minorité de firmes importantes, ou d’autres industries. Cette étude précise que les firmes détenant des brevets logiciels les utilisent majoritairement pour des raisons stratégiques, et non dans un but de retour sur investissement et de protection de la R&D. Par ailleurs, le nombre de litige impliquant des brevets logiciels a plus que triplé depuis 1999, diminuant l’incitation à l’innovation dans ce secteur. Elle conclut qu’il est difficile d’observer si le brevet logiciel apporte des effets bénéfiques à l’intérêt général. [2]
De plus, une des caractéristiques du brevet logiciel est qu’il porte sur une innovation cumulative. Ce type d’innovation implique de nombreux désavantages, à savoir des problèmes de marges multiples, des coûts de transactions qui limitent l’accès à la technologie et constituent donc un frein à l’innovation.
D’autres arguments peuvent encore être avancés à l’encontre du brevet, comme par exemple la rapidité de développement d’un logiciel comparé à la durée disproportionnée du brevet, le faible coût de développement qui permet aux communautés de développeurs « amateurs » d’innover, sans avoir besoin de brevet logiciel pour y être incité, mais dont le monopole conféré aux titulaires de ces brevets pourrait les entraver dans leur élan.
Cette énumération d’arguments me fait penser que le brevet n’est peut-être pas la forme la plus adéquate de protection de la propriété intellectuelle en matière de logiciels, comparé aux autres formes de protection que sont notamment le droit d’auteur et le secret industriel. Il est toutefois envisageable, comme le propose Adelin Delcorps, sous une forme remaniée en tant que régime sui generis adapté aux spécifités du secteur (en diminuant par exemple la durée de la protection).
[1 ]http://en.wikipedia.org/wiki/1-Click
[2] http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1868979
http://www.wipo.int/sme/fr/documents/software_patents.htm
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Etant donné que de nombreux arguments ont déjà été développés dans les commentaires précédents, je vais tenter d’approfondir les éléments qui me semblent pertinents et d’apporter une perspective nouvelle à la question.
Comme expliqué clairement dans l’article, le code source du logiciel, composé de texte et constituant une œuvre originale, est protégé par le droit d’auteur.
Notons que l’algorithme néanmoins, n’est pas protégé par le droit d’auteur, car il s’agit d’idées, celles-ci ne tombant pas sous la protection. Celui-ci peut alors, dans certains cas, être protégé par le brevet. L’auteur de l’article a déjà développé la question de la brevetabilité du logiciel dans son ensemble.
Penchons-nous sur les avantages d’une brevetabilité généralisée du logiciel.
Le brevet constitue un incitant à l’innovation : en effet, il s’agit de la théorie selon laquelle il faut récompenser les inventeurs en leur accordant une certaine exclusivité, pour que ceux-ci aient un incitant à innover.
La protection que constitue le brevet peut également être avantageuse, par le fait qu’un même brevet pourrait protéger plusieurs codes sources à la fois, alors que sous le droit d’auteur, la protection est accordée à chaque code source séparément. En effet, un brevet, quant à lui, pourrait couvrir une grande variété de codes sources.
Néanmoins, ce système comporte également de nombreux inconvénients.
Tout d’abord, au contraire de la protection par le droit d’auteur, le brevet n’est pas obtenu de manière automatique. Celui-ci doit faire l’objet d’une demande soumise à l’OEB, qui procèdera à un examen des conditions (à cet égard, l’article commenté et les divers commentaires ont déjà examiné la question sous l’angle de l’interprétation des conditions de brevetabilité). Le coût administratif de cette demande de brevet est fort élevé. De plus, la protection accordée est elle-même très coûteuse : elle nécessite le paiement d’une rente d’un montant croissant, afin de conserver l’exclusivité accordée, et ce pour une durée maximale limitée à 20 ans.
Ensuite, d’un point de vue plus économique, certes l’exclusivité juridique créée par le brevet permet d’exploiter la connaissance, entrainant une réduction des dépenses faites aux fins d’élaborer le logiciel et donc la rentabilisation de l’invention, mais simultanément, cela représente un coût conséquent pour la société. En effet, le monopole créé par le brevet permet à l’inventeur de vendre à un prix au dessus du prix normal du marché, provoquant une exclusion pour les autres acteurs et consommateurs.
Par ailleurs, un autre inconvénient majeur du brevet consiste dans le fait de publier la demande dans laquelle l’invention est décrite en détail. A partir du moment où le brevet est rendu public, toutes les informations relatives, telles que la valeur du droit de propriété et la description de la technique, le sont également. De la sorte, les informations sont rendues plus facilement accessibles aux entreprises concurrentes. Bien que celles-ci ne puissent pas copier littéralement le logiciel, les informations relatives au code source sont révélées et leur permettent de les utiliser afin de créer d’autres logiciels plus performants.
Face à ces inconvénients, la création d’un droit sui generis, comme l’avancent de nombreux commentateurs, semble pertinente. Cependant, il ne faut pas oublier les solutions classiques de protection d’une nouvelle invention :
La première consiste à conserver le secret des informations : celles-ci ne sont ni publiées ni divulguées au public, de sorte que les connaissances non codifiées subsistent sous forme de savoir faire. Ainsi, l’accès à l’information sera plus coûteux pour les concurrents. Il s’agit de ne pas révéler le code source produit.
La deuxième solution est l’avance technologique, qui permet à l’entreprise innovatrice de disposer quand même d’un temps de monopole : il s’agit du temps que prennent les autres entreprises afin de rattraper la technologie.
Reste à savoir si ces méthodes seraient efficaces en l’espèce.
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Il est évident que depuis la décision Koch (1) un programme appréhendé en association avec une machine est brevetable. En effet, in casu l’OEB a décidé qu’un programme pris en combinaison avec un calculateur universel est susceptible d’être breveté si le programme fait fonctionner le calculateur d’une manière différente.
La question de la brevetabilité du programme en lui-même est plus problématique. Comme l’ont exposé les commentateurs précédents, cela a une incidence sur l’interprétation des conditions de brevetabilité (invention nouvelle, inventive et susceptible d’application industrielle).
Le programme étant un jeu d’écriture, il est normal qu’on le protège en tant qu’œuvre littéraire. A mon sens, on peut également prendre ce jeu d’écriture comme permettant d’atteindre un résultat escompté. En ce sens, il s’agit d’un « procédé écrit » et comme tout procédé il est susceptible d’être breveté (2). C’est un ensemble d’étape conduisant à un certain résultat.
A mon avis, le problème de la brevetabilité des logiciels se pose surtout en terme économique qu’en question de droit. En effet, l’ontologie du brevet est l’incitation à l’inventivité en permettant aux inventeurs de couvrir leur frais de R&D. Les logiciels sont cependant le plus souvent des inventions cumulatives c’est-à-dire une invention réalisée en combinant plusieurs inventions antérieures. A mon sens, les frais de R&D ne sont par conséquent pas très importants. Le brevet dans cette hypothèse n’est donc peut-être par la protection la plus appropriée.
De plus, il faut rappeler qu’un brevet est un droit qui coute cher. A l’heure ou de plus en plus de développeurs se rallient à la « philosophie » de l’open source, d’aucuns estiment qu’étant donné le coût du brevet, ce type de protection ne serait pas accessible aux PME ou aux auteurs indépendants (3). On va dès lors favoriser les multinationales et risquer de créer des distorsions sur le marché de l’innovation.
Doit-on céder à la pression de lobbyistes dont le but est d’obtenir le plus gros portefeuille de brevets possibles dons un but purement stratégique ? Les problèmes liés à la qualification d’invention brevetable exposés par les précédents ne risquent-ils pas de dénaturer le droit de brevet simplement pour le profit de quelques lobbys ?
De plus, on risque de donner comme cela a été fait pour le droit d’auteur une protection bien trop importante qu’elle ne devrait l’être (4).
Pour conclure, le brevet ne me semble pas être la réponse la plus appropriée quant au problème de la protection des logiciels qui bénéficient déjà du droit d’auteur. Le risque est trop grand de voir une instrumentalisation du droit des brevets telle qu’on la connait déjà dans d’autres secteurs. De plus, on risque d’asphyxier les plus petits développeurs qui ne pourront pas s’offrir de brevet ni même par conséquent entrer dans le jeu des licences croisées. Au final cela ne ferait que concentrer le droit d’innover en matière informatique dans les mains de quelques grands groupes alors qu’au cours des dernières décennies les personnes qui ont le plus innover en matière informatique sont souvent des développeurs indépendants. Ne serait-ce pas tuer l’innovation ?
Si tant est qu’il faille donner une source de protection supplémentaire aux logiciels, alors je suis d’avis des précédents de créer un droit sui generis ne conférant qu’un monopole restreint sur une durée restreinte.
(1) OEB, CRT, 21 mai 1987, T 26/86, 3.4.1. : JCP éd. E 1988, II, 15297, n° 3.
(2) M. VIVANT, « La brevetabilité des programmes d’ordinateur : faux problème juridique ? Vrai problème social ? », in Propriétés Intellectuelles, 2003, n°6, p. 36.
(3) C. ROJINSKY, « Logiciels : « copyleft » et brevetabilité », in Légicom, 2001, p. 105.
(4) M. VIVANT, « La brevetabilité des programmes d’ordinateur : faux problème juridique ? Vrai problème social ? », op. cit., p. 37.
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Comme le dit Cécile Delfosse (dans son commentaire en dessous de l’ article), la question important à qui pose ici est de savoir si un software doit être protégé par un brevet ou par le droit d’auteur. En effet, le brevet et le droit d’auteur n’offrent pas la même protection : alors que le brevet protège, au-delà d’une forme particulière, les fonctionnalités de l’œuvre, le droit d’auteur ne s’attache qu’à protéger son expression (C’est-à-dire, dans le cas du logiciel, le code du programme, sous quelque forme que ce soit (code source, code binaire, etc.).
Dans le cadre de la protection des softwares, les producteurs doivent être protégés non seulement des concurrents mais également des consommateurs qui seront tentés de copier le logiciel. Pour la protection contre les imitations des concurrents le brevet est plus approprié. De plus, considérant que l’innovation des softwares implique des coûts relativement faibles par rapport aux bénéfices privés et social qu’ils génèrent. D’un point de vue social les brevets pourrait donner une protection trop forte aux producteurs de software.
Dans leurs travaux, Bessen et Maskin (2000) mettent en avant l’argument que, dans une industrie comme le logiciel, où l’innovation est à la fois:
• Séquentielle c.-à-d. innovation fait suite à une autre et que le produit final est l’enchevêtrement de ces innovations interdépendantes, dans le cas du logiciel un nouveau logiciel est construit sur des lignes de code précédent. Dès lors cela demande qu il y ai pas ou des brevets limite
• Complémentaire c.-à-d. qu’il y a des interdépendances complexes entre les différents logiciels et que l’interopérabilité est très important dans ce domaine, ceci peut conduire à « la tragédie des commun » lorsque d important droits de propriété forts sont attribués à les détenteurs de droits différents
==> Donc en gros on voit que l’introduction d’un système fort de propriété intellectuelle fondé sur les brevets aurait un effet inhibiteur sur la dynamique de l’innovation. En revanche, un régime de faible protection, parce qu’il ouvre des possibilités d’imitation, tend paradoxalement à encourager les efforts de recherche et d’innovation. Ces résultats ne tiennent certes pas compte de la procédure particulière des brevets qui permet à l’auteur d’une innovation de perfectionnement d’obtenir une licence d’exploitation d’un brevet pionnier antérieur.
Un autre facteur important dans la production du logiciel est la présence des effets réseaux. En effet, plus un logiciel acquière la notoriété, plus il sera adopte par les utilisateurs. Et donc in fine lorsque le logiciel est connu, il peut se retrouver en position de monopole. Dès lors on pourra se poser la question s’il est pertinent de légaliser la question, avec le risque que ça affecte cet effet réseau.
Lorsqu’on regarde les éléments ci-dessus on se raconte qu’il n’est pas évident d’étendre le brevet sur le software. En effet, la protection de l’innovation pourrai booster la rechercher et ainsi augmente les bénéfices sur investissement mais on voit de l’autre côté que le fait de breveté les logiciels pourrai freine l’innovation à cause de la nature séquentielle et complémentaire des logiciels. De plus, pour ces derniers on a besoin de l’interopérabilité pour qu’ils fonctionnent de façon optimale. Bessen et hunt (2004) affirment dans une étude faits sur le marché US qu’en général les entreprises brevète les softwares non pas pour recouvrir les frais investis dans la R&D mais plutôt pour des raisons stratégiques. Leur analyse indique également une corrélation négative entre le poids des softwares brevetés et le poids des investissements en R&D.
Bessen et Maskin (2000) ==> http://www.researchoninnovation.org/patent.pdf
Mirror of the‘ Tragedy of the Commons’ :Are source is prone to Over use when too many owners each have a privilege to use a given resource and no one has a right to exclude another
Bessen et hunt (2004) ==> http://www.researchoninnovation.org/softpat.pdf
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Le débat entourant la brevetabilité des logiciels soulève, depuis un certain temps maintenant, de multiples questions et controverses qui, comme nous le montre cet article, sont loin de toutes aboutir.
Une question particulièrement intéressante soulevé par ce débat concerne l’interaction entre la brevetabilité des logiciels et la présence croissante de mouvements open source. Ces derniers, comme leur nom l’indique, ont pour objectif de créer des logiciels en libre accès. En effet, le mouvement open source se caractérise par une propriété partagée du code source, et non pas, comme c’est le cas pour des logiciels brevetés, d’un code source privé et soigneusement protégé.
L’interaction entre la brevetabilité des logiciels et les mouvements open source nous permet de rebondir sur la question de l’innovation que la brevetabilité des logiciels encourage ou, au contraire, réprime.
Afin d’apporter certains éléments de réponses, il nous semble important de distinguer deux types d’innovations. D’une part, nous avons l’innovation au niveau de l’inventeur détenteur du brevet. Celui-ci, grâce au brevet, sera en mesure de récupérer une partie de l’investissement qu’il a effectué afin de développer le logiciel. En conséquence, le brevet à indéniablement un effet de promoteur de l’innovation, qui se traduit dans les faits par un accroissement des activités de R&D entreprises par les détenteurs de brevets sur des logiciels.
D’autre part, il est également important de tenir compte d’un second type d’innovation. Moins visible, celui-ci s’exprime au travers d’un réseau d’acteurs se joignant à des communautés virtuelles qui, elles-mêmes, se regroupent autours de projets de conception de logiciels dont l’accès est ouvert. Ce type d’innovation à grande échelle prend place de façon décentralisée. Elle repose par conséquent sur le partage du code source qui, même si souvent protégé par un droit d’auteur, est mis à disposition de tout développeur souhaitant participer au projet commun. Avec ce code source, sera également transféré au développeur le droit de le copier, de le modifier ou de le transmettre à son tour.
Face à cette double innovation, on constate que, certes, en restreignant les possibilités d’imitation, le brevet encourage l’innovation au niveau du détenteur du brevet. Cependant, il apparaît indéniable qu’il réduit également le potentiel innovateur du réseau de développeurs (mouvement open source), en opposant différents filtres à l’innovation. Ces « filtres » peuvent être distingués ainsi :
Premièrement, les détenteurs de brevets sur logiciels peuvent faire une utilisation stratégique de l’interopérabilité afin de protéger leur marché et d’opérer une « fidélisation forcée » de leur clientèle. En agissant de la sorte, ils créent des barrières à l’entrée du marché visé, bloquant ainsi l’accès au concurrents et évitant de perdre de la clientèle en imposant des coûts supplémentaires au consommateur désireux de passer sur un logiciel open source ayant la même fonctionnalité que le logiciel breveté.
Deuxièmement, la brevetabilité des logiciels aura un impact négatif sur les mouvements open source, dans la mesure où les développeurs participants au projet apparaitront de plus en plus réticents à s’engager dans des projets qui pourraient impliquer l’utilisation de codes sources similaires aux codes breveté ; ceci de peur d’être poursuivis en justice par le titulaire du brevet.
Finalement, la brevetabilité des logiciels confronte également le mouvement open source à un nouveau problème ; ce dernier devenant une proie de choix pour les patents troll qui peuvent pleinement déployer l’utilisation stratégique qu’ils font des brevets sur un nouveau terrain de chasse : celui des logiciels.
Sources :
– http://www.epo.org/news-issues/issues/computers.html
– M. Dapp et T. Bernauer, « Hot Debate about Chilling Effect : Do Software Patents Hamper Free/Open Source Software Development ? », 23 décembre 2008, disponible à l’adresse : http://www.ib.ethz.ch/docs/OpenSourceDaBe.pdf.
– N. Hoppen, D. Beimborn et W. König, « The Impact of Software Patents in the Structure of the Software Market, a Simulation Model », disponible à l’adresse : http://is2.lse.ac.uk/asp/aspecis/20030060.pdf.
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Tout d’abord, il me semble nécessaire d’apporter une précision simple quant à la distinction entre un programme et un logiciel. Le logiciel est constitué par un ensemble de programmes qui sont quant à eux, « la forme électronique d’un algorithme exprimé dans un langage de programmation ».
De plus il est important de remarquer que, la crainte de certains est qu’actuellement la loi ne suffit pas à rentabiliser les investissements en R&D. Quant aux autres, ils ont peur de voir une privatisation des idées par le fait d’une brevetabilisation des logiciels qui serait néfaste pour les petites entreprises, ce qui risque de freiner l’innovation dans le secteur informatique. Le problème réside dans les inventions faites, composées essentiellement de logiciels. Il est aussi nécessaire de constater les dérives que connaissent les États-Unis en accordant des brevets portant sur des procédés informatiques et méthodes commerciales utilisant des techniques évidentes. Notamment, « l’affaire Amazon.com » dans laquelle la société a obtenu un brevet par le Bureau américain des brevets et des marques de commerce (United States Patent and Trademark Office) sur la méthode One click qui permet d’effectuer des achats sur internet en un seul clic.
Actuellement, en Belgique, c’est le droit d’auteur qui protège les programmes d’ordinateur, par la loi sur les programmes d’ordinateur (LPO) et qui sont donc considérés comme œuvres littéraires. L’article 2, al. 2 de la LOP précise, « la protection accordée par la présente loi s’applique à toute forme d’expression d’un programme d’ordinateur ». Cela vise notamment, le code source (expression du logiciel dans le langage de programmation, compréhensible par l’être humain, dans lequel le programmateur l’a écrit) et le code objet (traduction du code source en langage compréhensible par la machine, soit en suite de 1 et de 0, qui donne les impulsions électriques à l’ordinateur pour atteindre un certain résultat). La jurisprudence belge qualifie parfois le jeu vidéo de programme d’ordinateur et lui applique le régime de la LPO.
Cependant, l’avantage du brevet est de protéger, au-delà d’une forme particulière, les fonctionnalités de l’œuvre, alors que le droit d’auteur ne s’attache qu’à protéger son expression. Il faut bien avouer que le droit d’auteur protège moins et ce parce qu’il ne s’attache qu’aux lignes de code. Il n’en reste pas moins protecteur mais d’après des spécialistes, il est très facile de reprogrammer la même chose avec des lignes différentes. Le logiciel ne s’arrête pas uniquement à cela, il est aussi un agencement de fonction, une architecture.
Ajoutons que d’un point de vue économique et particulièrement concurrentiel, l’avantage que les États-Unis ont dans la brevetabilité des logiciels est que ces derniers forment actuellement un marché de référence au sein des nouvelles technologies. Ceci implique un risque de délocalisation outre-Atlantique ainsi que le risque pour les entreprises européennes d’être incapable de s’attaquer au marché européen à défaut de monnaie d’échange que peut constituer les brevets.
Compte tenu de tout cela, nous sommes favorables à la constitution d’un droit de propriété intellectuelle sui generis concernant les inventions de logiciel. Selon une étude effectuée par Jean-Paul Smets-Solanes, la logique de ce droit sui generis réside dans les particularités propres au logiciel. Il faut savoir que la durée du cycle d’innovation est relativement courte étant donné qu’il s’agit d’un secteur qui connait une évolution rapide. Ce constat de temps marque la différence de ce que l’on peut voir dans les secteurs automobiles ou pharmaceutiques, ces-derniers étant de très importants utilisateurs de brevets. C’est pour cela que le brevet actuellement de vingt ans est inadapté à ce secteur. Il serait donc plus adéquat que le brevet logiciel puisse proposer une période de protection plus courte, et comme l’énonce le Conseil Général des mines, « un mini-brevet ».
Néanmoins, ce type de brevet de courte durée est contraire aux accords ADPIC qui interdisent les discriminations entre les différentes technologies. C’est pour cela qu’il faut un droit sui generis qui instaurerait un titre original d’une durée moins importante qui serait réservé aux logiciels. Il n’en reste pas moins que ce droit apporterait avec lui d’innombrables problématiques et notamment une réforme de l’examen de brevetabilité.
En conclusion, nous sommes pour l’instauration d’un droit sui generis qui s’avère être le plus adapté pour épouser au mieux les caractéristiques particulières liées à ce qu’est le logiciel. Un droit qui aurait les avantages du brevet mais dont la période serait moins importante que ce qui est en application dans les brevets actuellement.
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“En conclusion, nous sommes pour l’instauration d’un droit sui generis qui s’avère être le plus adapté pour épouser au mieux les caractéristiques particulières liées à ce qu’est le logiciel. Un droit qui aurait les avantages du brevet mais dont la période serait moins importante que ce qui est en application dans les brevets actuellement” (Delcorps Adelin).
Je suis également convaincu que le brevet d’invention n’est pas un droit intellectuel adapté à la protection des logiciels. En effet, le post soulève un certain nombre de difficultés pratiques liées aux caractéristiques particulières des logiciels. Alors, effectivement, pourquoi ne pas envisager l’instauration d’un droit sui generis qui protégerait le logiciel pour une durée plus courte que celle prévue dans le cadre du brevet d’invention. Il me semble toutefois que le raccourcissement de la période de protection ne permet de lever toutes les difficultés soulevée dans le post. Quelles seraient les caractéristiques essentielles du droit sui generis que vous proposez d’instaurer? Ou, quelles seraient les adaptations que vous apporteriez au brevet d’invention pour le rendre compatible avec les caractéristiques particulières du logiciel?
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Selon moi, à la question de l’OEB de savoir si une protection des logiciels doit se faire par le brevet ou par le droit d’auteur, les instances législatives devraient trancher dans le sens d’une protection en faveur du droit d’auteur. En effet, le brevet de logiciel comporte plusieurs difficultés techniques à sa mise en œuvre, comme souligné dans l’article.
Tout d’abord, tout comme les formules mathématiques, les logiciels ne sont que des suites de formules et d’algorithmes. Dès lors, créer un nouveau logiciel ne serait rien moins qu’une combinaison de diverses formules dans de nouveaux domaines. Ce sont des idées que l’on ne peut pas exclure de l’appropriation par autrui. Le droit exclut d’ailleurs la brevetabilité des formules mathématiques. En effet, si tous les programmeurs brevetaient leurs logiciels, cela deviendrait ingérable du fait du monopole que le brevet leur conférerait. Il faudrait demander des licences d’exploitation, il y aurait des problèmes sur le fait de savoir si un logiciel ne contrefait pas un autre, etc.
Ensuite, je pense également que, pour le critère de nouveauté d’une invention, il est trop difficile de juger de l’état de la technique dans le domaine des logiciels. Du coup, de manière implicite, la décision finale de la validité d’un brevet est laissée à la justice.
D’autre part, le brevet est plus désavantageux que le droit d’auteur au niveau de la procédure. En effet, avec le droit d’auteur le logiciel bénéficie d’une protection automatique dans les 165 Etats parties à la Convention de Berne. Or, avec le brevet, il n’est pas automatique et il faut en faire la demande dans chaque pays où l’on souhaite que son logiciel soit protégé. De plus, le droit d’auteur peut protéger jusque 70 ans après la mort de l’auteur.
Par ailleurs, on peut aussi se demander si la question du brevet de logiciel ne serait pas plutôt une question de lutte entre deux branches de l’économie du logiciel : d’un côté les logiciels marchands, dont les auteurs recherchent le profit et, d’un autre côté, les logiciels à bas prix voire gratuit, qui recherchent plutôt la notoriété. Ceux qui sont favorables au logiciel ouvert sont tentés de s’opposer au brevet, qui favoriserait l’économie du logiciel marchand. Dans leur recherche du profit, les plus grosses compagnies n’hésiteraient pas à attaquer en contrefaçon les plus petites entreprises parce qu’elles n’auraient pas le droit d’utiliser de simples formules.
Du point de vue de l’innovation, je dois admettre que le brevet aurait pu sembler intéressant au niveau de la divulgation. En effet, la divulgation peut permettre de faire des avancées dans divers domaines vu que les inventeurs doivent donner énormément d’informations sur leurs logiciels afin qu’un homme de métier puisse les recréer. Cependant, c’est l’effet inverse qui se produit en réalité. Le brevet diminue la concurrence, ce qui augmente le coût pour le consommateur et, au final, entrave l’innovation parce que, comme exprimé plus haut, pour avancer dans les recherches dans le domaine des logiciels, il faut pouvoir réutiliser d’autres idées/logiciels brevetés, cela ralentit donc le processus.
Pour conclure, je ne suis donc pas favorable au brevet de logiciel dans le sens où cela va à l’encontre de l’intérêt général. Les brevets seraient là pour servir les grosses compagnies par lesquelles il faudrait passer afin d’obtenir une licence pour continuer à innover.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Controverse_sur_la_brevetabilit%C3%A9_du_logiciel
http://www.wipo.int/sme/fr/documents/software_patents.htm
http://www.volle.com/opinion/brevet.htm
http://www.transfert.net/Breveter-les-logiciels-n-est-pas
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Bonjour,
Je rejoins assez l’avis des commentateurs précédents. Je ne vais donc pas vanter les mérites des brevets en tant qu’incitant à l’innovation ni reprendre en détail les critiques émises à l’encontre du brevet de logiciel.
Les créateurs de logiciels désirent avoir la possibilité de protéger leur création par le biais d’un droit de la propriété intellectuelle. Bien. Pourquoi pas. Cela ne me pose en effet pas de problème qu’un concepteur de logiciel ait le choix d’opter pour un logiciel libre, à la disposition tous ou désire protéger son travail et s’assurer d’un retour financier.
Aux Etats-Unis, c’est le brevet qui protège les logiciels. Hélas, comme mentionné et argumenté ci-dessous, cela ne me semble pas être la protection la plus adéquate.
Dès lors, en tenant compte des critiques émises sur le brevet de logiciel, essayons de dégager une solution (partant du postulat que le droit d’auteur est insuffisant).
L’idée serait donc de créer un droit sui generis propre au logiciel. Mais quel serait son contenu ?
Selon moi, il faudrait tout d’abord prévoir une protection plus courte que celle prévue pour les brevets. En effet, la protection d’un maximum de 20 ans propre au brevet ne se révèle pas très tactique dans le milieu informatique où tous les jours, des progrès considérables sont réalisés. Je pense donc qu’une protection de 3 ans maximum serait suffisante afin de rencontrer, d’une part, les impératifs de rentabilité qu’attend le concepteur du logiciel, et, d’autre part, les progrès techniques qui pourraient rendre obsolète le brevet. Quant au risque de monopole, conservons cet élément du brevet et permettons au concepteur de le céder, le vendre,…
Un autre problème de taille, si pas le plus important, concerne l’appréciation du critère de nouveauté nécessaire pour l’obtention d’un brevet. En effet, contrairement à d’autres domaines, en matière de logiciel, aucune base de données n’existe. Il est donc extrêmement complexe voire impossible qu’un expert ou une même commission d’experts puisse, à ce jour, se targuer de posséder des connaissances à ce point poussées en matière de logiciels qu’il leur serait aisé d’analyser ce caractère nouveau.
A partir de là, comment parvenir à protéger un logiciel, si la complexité de ce dernier ne nous permet pas de pouvoir le décortiquer afin d’en avoir une vue détaillée et d’en apprécier les composantes nouvelles ? C’est, pour moi, l’argument principal pour lequel le brevet ne peut pas fonctionner pour les logiciels. Il nous faut, par conséquent, trouver un nouveau critère qui permettrait de conférer un droit au concepteur du logiciel en ne se basant pas sur la nouveauté, concept trop difficile voire impossible à appréhender dans notre cas.
Dès lors, pourquoi ne pas réfléchir en s’inspirant de la protection offerte par les dessins-modèles, la matière étant également assez technique et évoluant très rapidement. Les conditions à remplir pour obtenir cette protection sont la nouveauté et le caractère propre. Si cette première condition n’est pas transposable en matière de logiciel, cela serait peut-être possible pour la seconde. Un « observateur averti » (je reprends ici la notion qui se trouve dans le droit des dessins-modèles que j’adapte dans le domaine des logiciels mais m’interroge sur les compétences de ce dernier, à savoir doit-il s’agir d’un expert ou d’une personne lambda qui posséderait des connaissances poussées en la matière et serait capable d’émettre un avis objectif ?) qui serait donc chargé d’apprécier si l’impression technique d’ensemble (et non plus visuelle comme pour les dessins-modèles) diffère de tout logiciel divulgué avant la date de dépôt de demande d’enregistrement. De cette manière, le logiciel bénéficierait d’une protection spécifique, adaptée à ses caractéristiques.
Ajoutons à cela un élément non négligeable, qui me semble assez intéressant et qui existe pour les dessins-modèles, à savoir la possibilité d’enregistrer ou non. Transposons-la en matière de logiciels. Si le concepteur ne fait pas enregistrer son logiciel, celui-ci aurait alors un droit d’interdire la copie de ce dernier pour une durée mettons de 2 ans au vu de la rapide évolution de la matière. Endéans la première année, il lui serait néanmoins loisible de faire enregistrer son logiciel obtenant de la sorte une protection plus grande, à savoir que le droit d’exclusif de l’utiliser, et d’interdire à tout tiers la fabrication, l’offre, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation,… Les avantages du non-enregistrement relevés par le Conseil européen en matière de dessins-modèles constatant que « cette forme de protection peut être utile dans des secteurs qui produisent d’importantes quantités de dessins ou de modèles destinés à des produits qui ont souvent une vie économique courte » sont en effet parfaitement transposables dans le domaine des logiciels. Cela serait peut-être une solution à creuser.
Ce ne sont là que des pistes de réflexion, mes compétences en matière de logiciel étant limitées, je n’appréhende certainement pas tous les tenants et aboutissants de cette matière techniquement complexe. Je tiens seulement à signaler que penser la protection des logiciels au départ du brevet ne me semble peut-être pas l’angle le plus adapté et qu’il serait peut-être intéressant d’aller voir du côté des dessins-modèles qui concernent, eux aussi, une matière très technique et évoluant extrêmement rapidement.
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